À travers son Pitch Survey, l’association luxembourgeoise des Agences Conseil en Marketing et Communication analyse régulièrement les tendances observées dans les pratiques de consultation. L’édition 2024 confirme une dynamique préoccupante pointant des appels d’offres toujours plus exigeants, chronophages et coûteux. Pour encourager une collaboration plus équilibrée entre agences et annonceurs, la MarkCom expose huit recommandations, et en appelle à la responsabilité des parties-prenantes en évoquant une nouvelle fois la nécessité de créer une Union des Annonceurs au Luxembourg.
Avec 28 agences membres représentant plus de 500 professionnels, MarkCom s’engage depuis de nombreuses années en faveur d’une meilleure reconnaissance de la valeur que les agences apportent à la communication des entreprises et institutions. Elle milite pour des pratiques plus transparentes, responsables et fondées sur une véritable relation de confiance.
À l’heure de dévoiler les résultats de son Pitch Survey 2024, la MarkCom confirme une dynamique préoccupante: les efforts demandés aux agences continuent d’augmenter, alors que les conditions de collaboration restent souvent inchangées.
Des efforts croissants pour un retour toujours incertain
Les données recueillies auprès de 14 agences membres, établies en moyenne par agence et comparant les résultats de 2024 à ceux de 2022, mettent en lumière un déséquilibre persistant:

Selon la MarkCom, ces chiffres dressent un constat sans appel: si le nombre de pitchs remportés progresse légèrement, les agences investissent de plus en plus de temps et de ressources dans des processus exigeants, dont la majorité restent non rémunérés. Dans le même temps, la rémunération moyenne pour les pitchs perdus diminue, tandis que le manque à gagner global augmente sensiblement. En tenant compte de l’évolution de l’indice salarial (944 en 2024 contre 855 en 2022), cela représente une baisse de pouvoir d’achat de 37% sur les projets non remportés.
Les agences investissent de plus en plus de temps et de ressources dans des processus exigeants, dont la majorité restent non rémunérés.
Ce déséquilibre croissant ne reflète pas une baisse d’efficacité ni de motivation des agences, mais bien une transformation des appels d’offres eux-mêmes. Ces derniers sont devenus plus complexes, notamment dans le domaine digital, avec des exigences accrues en matière de coordination, de spécialisation et de préparation stratégique. L’écart entre l’effort consenti et la reconnaissance reçue s’élargit, interrogeant directement la viabilité du modèle actuel pour de nombreuses structures.
Des appels d’offres toujours plus exigeants, un modèle sous pression
« Nous ne remettons pas en cause le principe même des appels d’offres ou des concours d’agences, qui restent utiles dans de nombreux cas. En revanche, il est de plus en plus courant de voir certains annonceurs consulter six à huit agences pour un même projet. Cela dilue les efforts, rallonge les délais et mobilise des ressources considérables sans garantie de concrétisation. D’un point de vue RSE, cela soulève aussi des questions: faire travailler autant de personnes, consommer papier, énergie, matériel, pour un projet sans suite, ce n’est plus défendable aujourd’hui. Nous militons pour une base de travail plus saine et constructive, fondée sur un véritable partenariat. » déclare André Hesse, Président de MarkCom.
Faire travailler autant de personnes, consommer papier, énergie, matériel, pour un projet sans suite, ce n’est plus défendable aujourd’hui. Nous militons pour une base de travail plus saine et constructive, fondée sur un véritable partenariat.
André Hesse, Président – MarkCom
À cette exigence croissante s’ajoute un autre facteur souvent négligé: les délais de remise des dossiers sont fréquemment très courts. Or, un pitch peut représenter 120 à 160 heures de travail, mobilisant plusieurs experts. Intégrer un tel projet dans un planning de production déjà chargé est un défi, d’autant plus lorsqu’aucune rémunération n’est prévue.
« Dans le secteur événementiel, on observe également une forme de tourisme d’agences lors des appels d’offres, ce qui crée un cercle anti-vertueux. Organiser un événement mobilise parfois jusqu’à 20 prestataires. En tant qu’agence, nous devons préserver notre crédibilité, mais aussi celle de nos partenaires. Il est de notre responsabilité de ne pas engager inutilement des ressources pour des projets sans perspectives réelles. À l’inverse, dans le domaine des relations presse, ce phénomène se produit rarement. Cela s’explique sans doute par la nature plus confiante et durable de la relation entre l’annonceur et son agence, qui repose davantage sur le lien établi et la connaissance du terrain. » détaille Patrick Lesage, Membre du Conseil d’Administration de MarkCom.
Il est de notre responsabilité de ne pas engager inutilement des ressources pour des projets sans perspectives réelles.
Patrick Lesage, membre du CA – MarkCom
8 recommandations concrètes pour rééquilibrer les pratiques
Face à ces constats, la MarkCom rappelle les principes essentiels d’une collaboration plus efficace entre agences et annonceurs. Ces recommandations, déjà portées depuis plusieurs années, visent à poser les bases d’un fonctionnement plus respectueux, transparent et équilibré pour toutes les parties:
- Limiter le nombre d’agences invitées à pitcher
- Mettre en place une rémunération systématique, même symbolique
- Communiquer le budget disponible dès le lancement de l’appel d’offres
- Fournir un briefing clair, précis et complet
- Organiser une sélection en deux étapes pour alléger la charge initiale
- Offrir un feedback constructif aux agences non retenues
- Privilégier les partenariats à long terme
- Encourager un dialogue structuré avec les annonceurs
Pour faire évoluer les pratiques de manière durable, MarkCom, en collaboration avec Espace Pub (fédération des régies publicitaires au Luxembourg) et le Conseil de la Publicité, réitère une nouvelle sa volonté de voir s’établir une Union des annonceurs au Luxembourg. Ce regroupement aurait vocation à instaurer un cadre de dialogue structuré, afin d’aligner les attentes et contraintes des deux parties et de faire progresser les pratiques collectivement.
Faire appel à une agence = choisir un partenaire
« Les agences de communication donnent le meilleur d’elles-mêmes lorsqu’elles s’inscrivent dans une relation à moyen ou long terme. Travailler avec une agence, c’est faire le choix d’un partenaire stratégique, capable de s’approprier progressivement les enjeux, les valeurs, la culture et les spécificités d’une entreprise. Cet apprentissage patient, cette immersion dans l’univers d’un annonceur, sont les conditions nécessaires pour proposer des idées justes, cohérentes et efficaces. Et c’est dans la durée que naissent les collaborations les plus solides. » martèle André Hesse, au nom des 28 agences représentées au sein de l’association MarkCom.